Ma pièce préférée.

Mon appartement se compose d’une chambre de 12m², d’un salon avec vue sur une rue paisible, d’une cuisine en bois clair, d’une salle de bain avec douche et sans baignoire et de toilettes impersonnelles. A 7 mètres de la chambre, partageant le mur porteur du salon, au sol recouvert de parquet clair, aux murs peints et non tapissés, se trouve une pièce.
Elle mesure 2m². Il y a des clous sur chaque mur. Des dizaines, centaines, milliers de clous chacun espacé à 0,5cm de son voisin, pour accrocher des œuvres à n’importe quel endroit. Mais le plus petit des tableaux ne peut être accroché puisqu’il faudrait enlever tous les clous environnants. Quel intérêt alors de laisser libre court à toutes les opportunités si c’est pour, par la suite, se priver des ces dites opportunités?
Elle est sans fenêtre. Le paysage changeant selon l’humeur du temps, il ne permet pas d’être maître de la décoration de cette pièce. Quel intérêt alors d’avoir planté tous ces clous si ce n’est pour ne pas à choisir quel message exprimer sur les murs?
Elle est sans lumière. Du moins lorsque l’on est dans la pièce. Les tableaux ont envie d’être observés, scrutés par des yeux globuleux et vitreux, humides et visqueux de l’espèce humaine. Quel intérêt alors de mettre de la lumière si c’est pour être vu de loin, avec froideur et indifférence?
Elle est toujours fermée à clef. On ne prendrait pas une seule seconde le risque d’abimer ces toiles par l’humidité de la salle de bain, par les divers odeurs de cuisine, par le son de la télévision du salon. Quel intérêt alors de laisser le libre accès à cette pièce si c’est pour l’envahir et la perturber par notre présence?

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